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Il est 8h38 du matin.Dehors, le ciel bleu pointe son nez, et le soleil brille à travers les arbres qui font face à ma fenêtre. Je m’apprête à prendre le petit déjeuner. Mon téléphone vibre. Tiens c’est Parrain? Ah cette heure-ci, c’est bizarre. 

“-Allo Parrain! (moi, étonnée) 

– Bonjour ma Lili (surnom qu’on me donne dans la famille). 

– ça va Parrain? 

– ben non, pas vraiment…

-ah! qu’est-ce qui se passe?… 

– (…) C’est F… Il est … ” Sa voix se brise. Je ne comprends rien. Je lui fais répéter jusqu’à temps que je saisisse. J’ai peur de comprendre. À ce moment-là, il y a eu un avant et un après.

À ce moment très précis, ma vie ne fut plus jamais la même. Une partie de moi s’est éteinte pour en faire éveiller une autre. Il m’a fallu des mois pour cesser de culpabiliser et pour tirer une leçon de ton départ volontaire. On a beau travailler jour et nuit, pour faire en sorte que le monde s’améliore à votre échelle, on n’est pas Dieu pour autant. Chacun sa place, chacun son job après tout. Et pourtant, quelle consternation de passer à côté de “ÇA”!

Malgré les douleurs des premiers mois, mon coeur blessé s’est renouvelé. On aurait dit qu’il avait été arraché pour être remplacé. Ton absence ne change pas grand chose dans  mon quotidien, mais dans mes pensées et dans mon coeur, tout a bougé.

Une fois, le deuil passé, j’ai compris que vraiment, ce n’est que l’amour qui peut nous sauver. Alors souvent ma prière, c’est d’avoir de l’amour dans mon coeur, de la véritable compassion dans tout ce que je vis, et ce que je fais. M****, il a fallu que tu partes pour que je comprenne… Moi qui me dis chrétienne!

Le plus dur, c’est de voir ton aîné grandir, et te ressembler de plus en plus. Il parle comme toi, il a les mêmes mimiques, les mêmes gestuels, la même voix. Je te revois en lui, au même âge, et ça me fait mal. Parfois, je regarde ta photo posée sur ma cheminée, ça me force à ne pas oublier.

Tu ne comprenais pas mes choix parce que je n’ai pas su bien te les expliquer. Ça aussi ça fait mal. Que tu n’aies pas compris ce que je vivais. Peut-être que tu n’aurais pas commis l’irréparable… Qui sait?

J’ai été la seule personne que tu n’as pas vue quand tu as fait le tour de la famille pour dire au revoir. La dernière fois, j’avais traversé tout Paris pour t’embrasser à l’aéroport. C’était un an avant. Je t’ai remis un Nouveau Testament comme cadeau pour ton nouveau départ, espérant que tu le lirais et que ça viendrait apaiser tes souffrances intérieures.Paraît que tu m’en as voulu. Ouais, en fait, c’est moi qui n’avais rien compris.

Samedi dernier, ça faisait 2 ans. Cette année, tu aurais eu 40 ans.

Eli, qui te demande pardon, cousin, de ne pas avoir réussi à te communiquer suffisamment d’Amour pour que ça te donne la force de rester.